Tribune libre
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« Jean d’O » a servi à la demi-brigade
de parachutistes, à Vannes-Meucon
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I
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l y a quelques jours, j’ai rédigé, pour
un petit hebdo très « droitier », un article sans complaisance sur
l’académicien Jean d’Ormesson. J’aimais bien, pourtant, la légèreté de ton et
l’humour de ses éditos dans « le Figaro » mais ses livres, un peu toujours les
mêmes, me tombaient des mains. Pour être franc, il en a écrit une
quarantaine, en ai-je lu cinq ou six
jusqu’au bout ? Rien n’est moins sûr ! Mon article m’a valu toutes sortes de
réactions : acquiescement, félicitations, désapprobation, reproches, moraline
pour midinette et même quelques (rares) engueulades.■
J
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e ne perdrai pas mon temps à
expliquer à ces braves gens (« brave » étant utilisé, ici, dans le sens de «
couillon ») que pour moi, « Jean d’O » n’est pas un grand écrivain. Qu’ils
lisent Raspail qui est, lui, un immense auteur et qu’ils comparent… Mais, après
tout, « des gouts et des couleurs, on ne discute pas ! ».
PAYS LÉGAL – PAYS RÉEL
C
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omment faire comprendre, en
effet, à cette « droite-cachemire »
- libérale, européiste, permissive -
qu’il y a, entre la droite de « Jean d’O » et la mienne, l’immense fossé
qui sépare le « pays légal » du «
pays réel », ou le rat-des-villes du rat-des-champs. Qu’il n’y a rien de
commun entre un petit Marquis poudré et la rusticité d’un modeste hobereau
provincial. Mais je n’ai aucune envie de m’expliquer, et encore moins de me
justifier.
La France est un drôle de
pays : une « société libérale avancée de
type permissive » comme disait Giscard. Un vieux pays qu’on s’ingénie à
déchristianiser depuis la révolution
mais qui a ses vaches sacrées, ses «
veaux d’or » et… ses veaux tout court qui les adulent, les honorent, les
encensent, et les pleurent … Et gare à celui qui ose émettre une critique,
aussi étayée, aussi modérée soit-elle,
contre ceux que le système, les médias et les « élites » autoproclamées
nous demandent d’idolâtrer ! Pas plus tard qu’hier, quelqu’un m’a
décoché l’argument « massue », celui
qui tue net toute velléité de critique ; j’en suis resté tout esbaudi : « Mais enfin, d’Ormesson était de droite et
il a été parachutiste… »
Avoir servi chez les paras n’est pas forcément un
gage de qualité
J
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e n’ai pas pour habitude de
critiquer mes frères d’arme. Je fais même partie des gens, trop rares à mon
humble avis, qui montent au créneau chaque fois qu’un plumitif assimile la
torture et la « Gégène » aux paras d’Algérie…Mais, avoir servi chez
les paras n’est pas, ne saurait être, un gage de qualité et encore moins de
vertu : Maxime Le Forestier a servi
sous le béret rouge des TAP, Jacques
Mesrine aussi et n’oublions pas Michel
Fourniret de sinistre mémoire.
Oui, « Jean d’O » a bien effectué son service militaire chez les paras:
à la demi-brigade de parachutistes coloniaux, à Vannes-Meucon. Il a terminé son
service avec le grade de caporal-chef : l’armée française n’a pas jugé utile
d’en faire un officier de réserve, pas même un sous-officier.
Ce
faux modeste, toujours cabotin, devait déclarer beaucoup plus tard sur RTL : «
On sautait par la porte et naturellement on sautait dans le vide. C'est
compliqué. On saute par stick, un stick c'est 12 ou 15 types et chacun pousse
celui qui est devant. Et moi, …par ironie parce que j'étais un intellectuel,
ils m'ont dit : « Toi, on ne te poussera pas. Tu sauteras si tu veux ». Et je
me suis dit : « Si tu ne sautes pas, tu es déshonoré » et j'ai sauté. Sauter en
parachute, c'est très très amusant… ».
Tout
d’Ormesson est résumé dans cette tirade : l’art de raconter n’importe quoi,
avec désinvolture et légèreté, tout en se faisant mousser au passage.
a)-
Jamais personne ne m’a poussé pour sortir d’un « Transall », d’un « Nord-atlas
» ou, plus tard, des nombreux coucous
des para-clubs civils.
b)-
Ceux qui ont connu le sort peu enviable
des « inaptes moraux » en unité TAP, savent qu’on ne saute pas « si l’on veut
». Les refus de saut sont rares pour deux raisons :
1)- la préparation, en
amont du saut, est relativement sélective.
2)- la peur des brimades
infligées au « refus de saut » est
souvent pire que la peur des premiers sauts.
c)-
J’ai aimé le vrai parachutisme (sportif) et j’aime toujours voler en parapente
mais, n’en déplaise à monsieur d’Ormesson, «
sauter en parachute » en ouverture automatique, chargé comme un mulet et à
basse altitude n’est pas « très très
amusant ». C’est un moyen efficace
de déposer au sol, des caisses, des Jeeps, et des bipèdes… Pour ma part j’ai
toujours préféré les héliportages.
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Le parachutisme militaire n’est pas un
sport, mais un moyen de transport
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En « OA »(1) on est un colis
largable, rien d’autre. Quand on a 20 ans, ça permet de frimer devant les nanas
mais ce n’est pas « amusant ». Jean d’Ormesson a donc bien été parachutiste :
la belle affaire ! Son passage chez les paras lui aura donné l’occasion de
parler de lui en bien, comme d’habitude. Mais, de mon côté, je tiens quand même
à faire ici mon « mea culpa ».
J’ai
osé écrire que l’académicien Jean d’Ormesson était un cabot, or il a terminé son service militaire comme
cabot…chef. Voilà une grossière erreur enfin réparée !■
Note
(1) : « OA » pour «
ouverture automatique » : en fait le parachute s’ouvre tout seul, sans
intervention de l’homme, grâce à une « Sangle d’Ouverture Automatique »(SOA)
accrochée dans l’avion.