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n France, l'échiquier
politique est particulièrement riche, bien fourni, diversifié, et nombreuses
sont les sensibilités qui y sont représentées et qui s'y côtoient. Ce large
panel devrait donc en théorie pouvoir répondre aux attentes de chacun mais avec
pour inconvénient de proposer trop d'alternatives, de subtilités, de variantes
qui font que c'est un labyrinthe où il est plus facile de se perdre et de se
tromper d'adresse que de trouver son chemin.¢
Gauche
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Droite
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Depuis
plusieurs décennies deux grandes lignes s'affrontent et rivalisent pour
l'emporter lors des rendez-vous électoraux, la Droite et la Gauche qui, au gré des alternances, se partagent
tour à tour la gestion du pouvoir. Lorsque le pays est gouverné à gauche, le
peuple souhaite rapidement passer à droite et inversement quelques années plus
tard. C'est sans doute la définition de la cohérence nationale et la traduction
de l'adage qui dit que l'herbe est toujours plus verte dans le pré d'en face.
Mais
au-delà de ces deux tendances majeures, nous avons vu émerger au fil du temps
des ramifications qui se sont greffées, à commencer par des extrêmes (chaque courant possède le sien baptisé « Front »), des ailes qualifiées de « dures » mais
accueillies avec bonhomie et tolérance pour l'une et opprobre et rejet pour
l'autre... Puis un centre qui aurait
du en toute logique se situer au milieu, mais qui peut avoir une géométrie
variable et excentrée puisque l'on parle aussi d'un centre droit et d'un centre
gauche (il existe aussi un ¾ centre mais celui-ci est hors sujet car n'a
strictement rien à voir).
Notons
également la présence plus récente d'une
branche « vert kaki » qui a politisé l'écologie à tel point qu'aujourd'hui
se dire écologiste ne signifie plus forcément chercher à préserver la nature,
l'environnement, le cadre de vie et le doux gazouillis des oiseaux, mais aussi
militer pour la régularisation des sans-papiers, l'hébergement à l'hôtel et les
soins des clandestins, l'accueil de tous les déshérités de la planète avec, en
cadeau de bienvenue, un droit de vote estimé légitime... ce qui ne correspond
pas forcément à l'idée basique et xénophobe que l'on peut se faire de la lutte
contre les marées noires, la pollution, la sauvegarde de la planète.
Il
ne faut pas oublier non plus les mouvances marginales représentées par les anarchistes, les communistes et autres fascistes,
royalistes, indépendantistes, qui viennent compléter un arbre généalogique déjà
chargé, mais qui ont aussi leurs adeptes et donc leur clientèle.
Mais
comme il est plus facile de faire compliqué que de faire simple, nous avons
également introduit les notions d'alliance,
d'union, d'accord local, de rapprochement
opportuniste, de tractations,
parfois antinomiques, tout en constatant toutefois que ces manœuvres politiciennes
ne s'effectuent pratiquement que du côté gauche de l'échiquier, la stratégie à
droite étant de s'opposer avec véhémence à toute éventuelle « compromission »
qui signifierait perdre son âme en
envisageant des arrangements contre nature en raison de valeurs qui ne seraient
pas partagées.
Au
sein même de chaque mouvement, en particulier les deux plus importants, nous
pouvons aussi constater qu'il existe des sous-familles qui peuvent faire
entendre des voix discordantes, avec pour la droite les humanistes, les
progressistes, les populaires,
ceux qui revendiquent la « droitisation
» et ceux qui s'y opposent, et pour la gauche, les conservateurs, les radicaux, les rénovateurs. Et dans chaque camp, les éternels utopistes qui font face aux réalistes, auxquels s'ajoutent dans un
souci de simplification les « divers »
droite et « divers » gauche.
Bref
un vaste vivier ou plutôt une fourmilière grouillante qui doit cohabiter avec
plus ou moins de bonheur pour tenter de rassembler dans chaque chapelle le
maximum de brebis dont un certain nombre seraient paraît-il égarées,
désemparées, désabusées, à la recherche d'un refuge, d'une famille d'adoption,
d'un parti auquel se raccrocher.
E Au vu de ce constat,
il peut sembler nécessaire de ne plus parler d'échiquier, même si ce terme
suppose la présence d'un fou et de pions, mais plutôt d'un patchwork ou d'un
kaléidoscope multicolore puisque les tendances politiques sont différenciées
par des couleurs qui vont du rose pâle au noir foncé, en passant par toute une
déclinaison chromatique plus ou moins harmonieuse.¢