Une mise en ordre du
“continuum pénal” s’impose à l’État, qui doit reprendre en main son appareil de
sécurité.
Lors
d’un début de cycle, début 2013 donc, retour aux fondamentaux, vitaux pour
pouvoir bâtir sur un socle solide. En matière de sécurité, les Français vivent
encore dans un État-nation, communauté de destins dont l’objet même est
d’assurer qu’un territoire (ici, la France) vit “respecté à l’extérieur, en
paix à l’intérieur”, selon la brillante formule de Raymond Aron. Telle est la
mission fondamentale, la raison d’être de cette lourde et coûteuse machine. Qui
ne fut pas fondée pour fixer la date des soldes ou le salaire de nuit des infirmières,
mais pour que ceux qui l’entretiennent – et parfois meurent pour elle – vivent
sans crainte de l’étranger, ni du chaos intérieur.
Dans la France du début
2013, cette sécurité intérieure est mauvaise.
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Mondialisation, libéralisme, Union européenne
: de gré ou de force, l’État-nation européen évolue – plutôt dans la bousculade
et sous la contrainte. Mutant cahin-caha en État-marché, l’État-nation hérite
ainsi d’une contrainte nouvelle et transversale, nationale et internationale à
la fois : assurer la fluidité optimale des flux humains, marchands, financiers,
traversant son espace.
À
cet effet, l’appareil d’État doit maîtriser quelques cruciales capacités :
prévoir, comprendre, déceler (c’est-à-dire, en fin de compte : nommer), puis
prévenir ou sanctionner (ce qui dans un État de droit signifie : juger). Ceci
rappelé, venons-en à notre prévision criminologique, concernant la sécurité
intérieure.
Dans
la France du début 2013, cette sécurité intérieure est mauvaise – et tout
montre hélas qu’elle ne saurait s’améliorer bientôt, sans une profonde révision
des doctrines et pratiques du présent gouvernement. Au-delà de toute chicane
sur la valeur des chiffres, leur mode de collecte, etc. – même grossiers et
flous, ceux-ci montrent une indéniable augmentation des violences physiques,
vols et fraudes diverses. Et puisqu’on parle désormais de sécurité des flux,
une explosion des vols et actes violents commis sur le réseau ferré et sur ceux
des autobus.
Cambriolages
en rafale, rapines et petits braquages en série : depuis 2011, la France périurbaine
et rurale est mise au pillage systématique ; même la campagne profonde n’y
échappe désormais plus.
La
police, la gendarmerie sont-elles fautives ? Ont-elles démissionné ? Non. Nos
forces de l’ordre sont efficaces et affûtées – preuve : l’importance des
interpellations et affaires résolues. Mais à elles seules, ces forces ne
suffisent pas : la sécurité intérieure d’un Etat moderne forme un continuum
débutant par une décision politique et continuant par le renseignement, puis
par l’action policière de terrain. Viennent ensuite la justice, et enfin, le
travail social ou le pénitentiaire. Ces divers éléments sont les régiments
d’une armée : leur entente, leur coordination, sont cruciaux pour gagner la
bataille. Or, depuis 2012, cette armée-là est désunie, on y tire à hue et à dia
– pire, on y entend parfois que tout va bien et qu’il n’y a pas lieu de se
battre.
Pourquoi
? Reprenons nos deux termes cruciaux.
Le « politiquement correct »
interdit de nommer le problème ou l’adversaire.
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Nommer:
formidable est le pouvoir la nomination : “Le nom fait faire connaissance…
Nommer dévoile… Par la vertu de l’exhibition, les noms attestent leur
souveraineté magistrale sur les choses” (Martin Heidegger). Or le “politiquement
correct” interdit de nommer le problème ou l’adversaire. En médecine, ne pas
nommer une maladie grave condamne le patient ; en stratégie, ne pas nommer la
menace condamne celui qui est attaqué. Refouler toute nomination aveugle l’État
en lui interdisant la prévision ; met en péril ceux qui le servent, les empêche
in fine d’accomplir leurs missions. Car le plus vite, le plus précisément
possible le fauteur de violence est nommé et désigné – donc le diagnostic fait
-, le plus tôt et le plus chirurgicalement possible ce malfaiteur est
interpellé, le mieux cela vaut – et c’est justement cette voie que le “politiquement
correct” condamne.
Observons
maintenant la criminalité qui ravage la France : vols à la tire, explosion ;
vols en bande organisée dans les résidences principales et secondaires,
explosion ; vols par effraction dans les commerces, explosion. De partout,
villes, syndicats de transports et de commerçants crient à la “suractivité de
la délinquance roumaine et bulgare”.
Mais
là, des dirigeants politiques prosternés devant les Tartuffes médiatiques,
étouffés par le politiquement correct et l’idéologie gnan-gnan-abbé-Pierre,
s’interdisent de nommer, désigner, dire.
Ils
ne peuvent publiquement révéler qu’il ne s’agit en rien de “Roumains” ou de
“Bulgares” en général – qui vivent en Roumanie et en Bulgarie – mais de clans
nomades criminalisés issus de l’Europe du Sud-Est, dont les infractions
précitées constituent la très exacte signature prédatrice. Comment conduire un
appareil de l’État en lui désignant sa mission, ses “clients”, par des euphémismes
de précieuses ridicules, ou des finasseries sémantiques ?
C’est bien sûr impossible. Et voilà les forces de l’ordre déjà paralysées, avant même d’avoir pu agir.
Sous l’impulsion d’une
garde des Sceaux enivrée de “culture de l’excuse”, la justice part en vrille.
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Juger:
c’est à l’évidence la mission de la justice. Or en France, sous l’impulsion
d’une garde des Sceaux enivrée de “culture de l’excuse”, la justice part en
vrille. Là aussi les plaintes affluent, citons celles de la RATP : “De
nombreuses affaires transmises à la justice parisienne sont restées en jachère.”
Et tandis que des délinquants, voire des criminels, ressortent hilares de tribunaux
impotents, la ministre nourrit le rêve pathétique de mettre à des racailles des
bracelets électroniques que ceux-ci exhibent ensuite fièrement ; voire de taxer
des bandits nomades, ou planqués dans des coupe-gorge où, depuis belle lurette,
nul ne paie plus impôts, ni taxes, ni loyers.
Une
mise en ordre du “continuum pénal” s’impose donc à l’Etat, qui doit reprendre
en main son appareil de sécurité. Contraindre aussi la DCRI à s’intéresser aux
vraies menaces, non aux lubies de son goût. Bref : il doit gouverner. S’il ne
le fait pas, et vite, 2013 sera, en termes de sécurité, un annus horribilis par
excellence.