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a déchéance de nationalité pour les binationaux nés Français
condamnés pour terrorisme, mesure que le gouvernement entend introduire dans
son projet de révision constitutionnelle, rencontre une vive opposition à
gauche. « Nous ne sommes pas
capables de la faire 'passer', 80% des députés de gauche sont contre »,
a souligné jeudi un haut responsable socialiste de l'Assemblée. « Autrefois à gauche, on s'est vraiment
battus contre ça. Je persiste à penser que c'est quelque chose à manier
avec beaucoup de délicatesse, car c'est nous qui avons façonné ces jeunes
aujourd'hui visés par une déchéance de nationalité », renchérit un
ministre du gouvernement de Manuel Valls. Repentance toujours !n
Pour alternative, le président
du groupe des radicaux de gauche, Roger-Gérard Schwartzenberg, a proposé de
rétablir la « dégradation civique ».
Il rappelle dans un
communiqué que la déchéance de nationalité existe (article 25 du Code civil),
cette déchéance pouvant concerner un binational qui a acquis la qualité de
Français, mais non pas s’il est né Français.
Étendre cette sanction aux
binationaux français de naissance « marquerait une nette rupture avec
notre tradition juridique », souligne Roger-Gérard Schwartzenberg.
« Par ailleurs, elle
n’empêcherait pas la Cour européenne des droits de l’Homme et la Cour de
justice de l’UE de contrôler sa compatibilité avec la Convention européenne des
droits de l’Homme », ajoute-t-il.
La solution qu'il propose,
l'interdiction des droits civiques, civils et de famille, a remplacé dans le
nouveau Code pénal de 1992 la dégradation civique pour devenir une peine
complémentaire et de durée temporaire.
« Rétablir cette peine
sous sa dénomination antérieure dans le Code pénal - qui a simple valeur
législative - éviterait d’avoir à réviser la Constitution et à sembler y
inscrire une distinction entre deux catégories de Français », dit
Roger-Gérard Schwartzenberg.
DÉCISION
D'ICI MERCREDI
Selon lemonde.fr, le Conseil
d'État a remis au gouvernement un avis favorable à la déchéance de nationalité,
mesure réclamée par le Front national
et une partie de la droite, qui « répond à un objectif légitime mais ne
serait pas dissuasive pour les terroristes ».
Elle souligne toutefois que
cette mesure « pourrait se heurter à un éventuel principe fondamental reconnu
par les lois de la République », qui interdit de priver les
Français de naissance de leur nationalité.
Cet avis ne facilite pas la
tâche du gouvernement, qui insiste sur la nature symbolique de la mesure et
semblait enclin à l'abandonner face à l'hostilité de la majorité.
« Ce n'est pas un outil
pour lutter contre le terrorisme. Toute décision sur ce sujet appartient au
président de la République », dit-on de source
gouvernementale.
L'exécutif a jusqu'à
mercredi prochain pour trancher. C'est à cette date que sera présenté en
conseil des ministres le projet de loi constitutionnelle.
L'article 2 du texte, qui
ajoute un alinéa à l'article 3 de la Constitution, dispose qu'"un Français
qui a également une autre nationalité peut (...) être déchu de la nationalité
française lorsqu'il est définitivement condamné pour un acte qualifié de crime
ou de délit constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou
pour un crime ou un délit constituant un acte de terrorisme".
Pour être adoptée, la
réforme doit être votée dans les mêmes termes par les deux assemblées puis
soumise - la voie référendaire est
exclue car jugée « trop dangereuse » par les socialistes, - au
Parlement réuni en Congrès à Versailles où la majorité requise est des trois
cinquièmes des suffrages exprimés.
Un
scénario qui nécessite les voix de toute la gauche et d'une grande partie de la
droite.n
