C’est
un fait, notre président de la République semble obsédé par le détricotage de
l’ensemble de l’œuvre de son prédécesseur.
Néanmoins un artefact sarkozyste
semble échapper à la vindicte liquidatrice de François Hollande : le CFCM
(Conseil Français du Culte Musulman), qui se révèle, année après année, être
uniquement une organisation de lobbying « anti-islamophobe », aux antipodes,
donc, de son intitulé cultuel et de sa vocation initiale de structuration d’un
islam de France en phase avec les valeurs de la République.
Ainsi
après l’intervention spectaculaire des forces de police contre le réseau
terroriste impliqué dans l’attentat de Sarcelles, et après la réception des
autorités juives à l’Elysée ce dimanche, le président du CFCM s’est-il fendu
d’un communiqué très en deçà du minimum syndical républicain.
Certes,
Mohamed Moussaoui a exprimé son indignation et assuré les juifs de France de sa
“solidarité fraternelle”, mais Dieu que tout ça est platonique, car pas suivi
d’actes concrets, ni même de l’annonce tonitruante d’actes concrets qu’on peut
oublier sitôt prononcés, dans les meilleures traditions universelles de la
politique.
Ce
minimum du minimum-là, son frère ennemi Dalil Boubakeur, lui, s’y est tenu. Le
recteur de la Grande Mosquée de Paris a ainsi appelé, ce même dimanche, les
organisations musulmanes chargées du culte “à réfléchir aux solutions pouvant
permettre d’éviter la propagation d’activités terroristes contraires aux valeurs
de la République et aux principes humanistes de l’islam”. Le recteur a
carrément enfoncé le clou en rappelant une certaine affaire Merah que beaucoup
semblent avoir oublié, six mois seulement après les tueries de Toulouse et
Montauban : “Cette affaire, loin d’être isolée et exceptionnelle, révèle
malheureusement la présence et la formation de nouveaux candidats à la
radicalisation d’un islam djihadiste”. Et c’est bien de la France qu’il
parlait.
On
cherchera en vain l’esquisse d’une telle démarche, ou annonce de démarche, dans
le prêche dominical de M. Moussaoui. Il est vrai qu’elle aurait eu valeur
d’autocritique, un exercice dont ce président-là n’est guère friand. Et puis
surtout, on ne peut pas courir deux lièvres à la fois, et le gibier qui ce
jour-là préoccupait le CFCM n’était pas les franco-djihadistes mais Jean-François
Copé.
Je
ne suis bien sûr pas dupe du néo-laïcisme « décomplexé » de l’actuel chef de
l’UMP. Cet aggiornamento cousu de fil blanc, vise bien plus le laissez-fairisme
supposé de François Fillon que les talibanets de banlieue brandissant leur
Coran pour bouter les pains au chocolat hors des cités. On aurait été nettement
plus convaincu de sa sincérité si Copé avait sonné le tocsin à chaud, en plein
consensus médiatico-politique du Ramadan qui, n’est-ce pas, a pour vocation
première de rapprocher les communautés.
Mais
halte au feu, je cesse là de flinguer Copé car bien d’autres s’en chargent, et
à balles réelles : toute communicante qu’elle soit, cette conversion soudaine
de notre néo-néogaulliste aux valeurs basiques de la République, y compris la
défense subséquente du droit à l’athéisme glouton au pied des barres HLM a
brutalisé tout ce que notre pays compte d’oreilles chastes, depuis l’inexistant
François Baroin (“Ces petites phrases sont toxiques et dangereuses et altèrent
le pacte républicain”) jusqu’à la dégoulinante Anne Roumanoff qui ce matin a
abandonné sur Europe 1 toute velléité comique pour éditorialiser solennellement
sur la marinisation des esprits et conclure de son ton le plus concerné qu’ «
elle ne mangeait pas de ces pains-là ». Bon appétit, Madame !
On
s’en doute, les pieuses oreilles de l’auguste Moussaoui ont été elles aussi
horrifiées par la sortie du croisé seine-et marnais. En vertu de quoi le
président du CFCM a fort logiquement déduit de l’affaire Jérémie Sidney vs la
France qu’il fallait que sa religion et les pratiques qui, d’après lui, doivent
en découler cessent d’être “une source permanente de polémiques et de débats
publics dont certains contribuent, malheureusement, à nourrir la stigmatisation
et le rejet de l’autre”.
Nous
qui nous sustentons en plein Ramadan, et même, pardon maman, en plein Kippour,
nous voilà accusés de nous nourrir de stigmatisation, ce qui est bien pire pour
la santé que le régime Dukan.
Eh
oui, les amis, car le problème, le seul problème ce n’est pas la multiplication
des « nouveaux candidats à la radicalisation d’un islam djihadiste » contre
laquelle nous met en garde Dalil Boubakeur, non, la vraie urgence c’est
d’empêcher les zabominables zamalgalmes, comme l’exige Moussaoui : “Au
moment où des membres de réseaux extrémistes (…) font l’objet
d’interpellations, le CFCM en appelle à la conscience et à la responsabilité de
chacun afin d’éviter tout amalgame avec l’ensemble des musulmans qui sont
profondément affectés par l’instrumentalisation faite de leur religion par ces
individus”.
En
conséquence de quoi le CFCM appellera les cinq millions de musulmans de France
à descendre dans la rue dès ce soir pour prouver aux terroristes qu’eux non
plus ne mangent pas de ce pain-là. Non, là, je blague…
Causeur.fr
(posté par Marino)