HISTOIRE
M
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a
grogne d’aujourd’hui concerne les inepties et les mensonges que l’on peut
entendre au sujet du régime de Vichy : assez régulièrement, des journalistes,
des «historiens», des hommes politiques - de droite comme de gauche - viennent
dénoncer « les heures les plus sombres de notre histoire » en affirmant
péremptoirement que « L’État Français » n’a jamais existé puisqu’il n’avait,
d’après eux, « aucune existence légale ». Qu’il est facile de « tirer sur une
ambulance » et davantage encore, sur un corbillard !■
A
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lors tentons de rester
factuel, sans passion partisane: on voudrait nous faire croire que l’« État français » était illégitime donc
illégal. Cet énorme « bobard »
permet de tirer un trait sur quatre années de notre histoire, de l’armistice de
juin 1940 à la Libération.
Pétain et Laval auraient,
nous dit-on, effectué une sorte de coup d’État pour s’emparer du pouvoir. Or
les parlementaires français ont accordé les pleins pouvoirs au Maréchal
Philippe Pétain par 569 voix pour et 80 contre, soit, en gros, 85% des
suffrages exprimés.
Pour
être précis, le vote se décompose comme suit :
Votants...................................................666
Majorité
absolue ....................................333
Pour
.......................................................569
Contre
......................................................80
Abstentions
..............................................17
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Seuls
27 parlementaires quittèrent
la France à bord du Massilia
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Rappelons aussi que ce vote
a eu lieu le 10 juillet 1940. Comment
ose-t-on écrire que la France et ses représentants légaux ne pardonnaient pas
au Maréchal Pétain d'avoir demandé les conditions d'un armistice le 17 juin ? On nous raconte, et ce depuis la Libération, que « tous les parlementaires n’étaient pas
présents », qu’une partie du gouvernement, des députés, des sénateurs,
avaient embarqué sur le « Massilia »
au départ de Bordeaux, vers l’Afrique du Nord. Or le « Massilia » a appareillé de 21 juin 1940, soit quatre jours après
la constitution du premier gouvernement du Maréchal Pétain. À son bord, 27
parlementaires français, pas un de plus. Si
ces 27 avaient voté contre les pleins pouvoirs, ça n’aurait RIEN changé au
résultat final.
Le « Gouvernement de Vichy » a été institué par la loi
constitutionnelle du 10 juillet 1940.
Cette loi invitait le
gouvernement du Maréchal à promulguer «
une nouvelle Constitution de l’État français ». Rappelons, au passage, ce
qu’est une Constitution : « C’est la
volonté d’un peuple de s’ériger en Nation. »
Cette nouvelle
Constitution devait garantir « les
droits du Travail, de la Famille et de la Patrie ». On notera que la
formule « État français », comme la
devise « Travail, Famille, Patrie »
furent utilisés - donc légalisés - par l’Assemblée Nationale dont plus de la
moitié des membres étaient de gauche (SFIO, Radicaux socialistes…).
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Albert
LEBRUN
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Certes, le régime qui
s'installait rompait avec la tradition républicaine, mais cela est dû au refus du président Lebrun de démissionner,
malgré les supplications de Pierre-Etienne Flandin qui souhaitait que le président de la République se retire au
profit du Maréchal Pétain. Ce dernier aurait alors dû appliquer à la lettre les
textes constitutionnels de 1875 : la
Constitution de 1875 donnait au chef de l’État la plénitude totale du pouvoir
exécutif (puisqu’elle ignorait le président du Conseil).
De surcroît, l’article 1er
de la loi constitutionnelle du 16 juillet 1875 précise que les sessions
parlementaires doivent durer au moins cinq mois par an. Dès lors le
gouvernement aurait pu se dispenser de réunir le parlement jusqu’en janvier
1941, puis clore la session jusqu’au 1er août. Dans l’esprit de Pierre-Etienne Flandin, ça ouvrait toutes les
possibilités. L’obstination d’Albert
Lebrun, conduisait forcément (et légalement) à la mise en place d’un nouveau
régime.
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Charles
MAURRAS : royaliste, chef d’Action Française
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De plus, la doctrine
sociopolitique que véhiculait le nouveau gouvernement est la résultante de
réflexions de milieux intellectuels très divers. On a surestimé, après-guerre,
le rôle et l’influence des maurrassiens. Mais, dans une large mesure, la « Révolution Nationale » diverge, et
même parfois s’oppose aux conceptions maurrassiennes. Bien plus important est
l’impact de ceux qu’on a appelés les «
non-conformistes des années 30 », les gens de la revue « Esprit » (Emmanuel Mounier, Georges Izard, Daniel Rops) ou d’« Ordre nouveau » (Robert Aron) ou
encore les disciples de Tardieu : les uns et les autres, très critiques à
l’égard du parlementarisme, voulaient une réforme rendant sa primauté à
l’exécutif, souhaitant la création d’un état corporatif. C’était également le point de vue
d’économistes éminents : Gaëtan Pirou ou François Perroux. Et l’avis des
milieux catholiques depuis Albert de Mun et La Tour du Pin.
Le
Maréchal Pétain est donc arrivé au pouvoir le plus légalement du monde !
Et le pays tout entier,
ébranlé par la mémorable «raclée» de
juin 1940 - des civils sur les routes de l’exode, une armée en miettes, 1.8
million de prisonniers - fut bien
heureux que le «vainqueur de Verdun»,
vieux Maréchal de 83 ans, fasse «don de
sa personne à la France» pour atténuer ses malheurs.
Ensuite, dans un pays
qui comptait alors 42 millions d’habitants, il y eut, selon l’historien Henri
Amouroux, «40 millions de pétainistes»
et ce, jusqu’au débarquement du 6 juin 1944.
Les mêmes se
réveillèrent gaullistes après le débarquement
et le vieux Maréchal devint le bouc émissaire, le responsable des «heures les plus sombres» et du malheur
des Français.
De
Gaulle n'avait pourtant rien d'un grand homme mais c'était un remarquable
illusionniste, or le Français a besoin d'illusions: c'est
sous De Gaulle que la France connut la Libération et mai 1968.
Deux psychodrames
épisodiques grâce auxquels les Français retrouvent une conscience et la France,
un pucelage. La pantalonnade de mai 68 a
permis de passer de « la Carmagnole »
à « la Marseillaise » sans passer par la révolution. Quant à juin
1944, ce fut, pour une majorité de nos concitoyens, ce qui a permis de sauter
du passé à l'avenir sans avoir besoin du présent ou mieux, de passer de la
défaite à la victoire sans passer par la guerre.
►Finalement, De Gaulle aura été - à
trois reprises si l’on rajoute le drame algérien - la bonne conscience des
lâches.■