Aix-en-Provence - Le
jeune prévenu s'exprime assez lentement, d'une voix pas toujours audible, les
yeux figés et le doigt parfois pointé. Ali El Boustati est inquiétant.
C'est le
tribunal, le procureur aussi, qui le disent, ainsi que le président de
l'université d'Aix-Marseille, Yvon Berland, qui lui a interdit l'accès durant
30 jours aux cours du "master monde musulman" au printemps 2012,
alors qu'il venait de frapper un enseignant, Frédéric Imbert.
Peu
après, le conseil disciplinaire de la faculté décidait de l'écarter durant 5
ans de l'enseignement supérieur français et le parquet d'Aix de le renvoyer
devant le tribunal correctionnel pour violences et menaces de mort sur une
personne chargée d'une mission de service public.
Ali
El Boustati, qui vit à Aix, s'est visiblement lancé dans une guerre
intellectuelle contre toute personne qui -- selon sa perception, qui pose
question aux yeux des psychiatres qui l'ont examiné et qui parlent d'un jeune
homme "psycho rigide" -- maltraiterait par les mots ses
frères musulmans ou sa religion.
Ce
fut le cas, à son sens, de son professeur de grammaire arabe, "et ce
depuis longtemps" affirme-t-il, à la barre. "Monsieur
Imbert se permet durant ses cours d'insulter les musulmans" assure le
prévenu, "il fait sa propagande anti-islam, c'est inacceptable et
j'ai d'ailleurs déjà fait une main courante en septembre 2011".
Boustati,
après avoir fait plusieurs reproches à son prof, s'est donc "vengé"
physiquement le 14 mars dernier en lui infligeant un coup de pied au menton,
alors que Frédéric Imbert était assis en salle des enseignants.
DES
VIOLENCES PHYSIQUES NIÉES PAR LE PRÉVENU
Le
jeune homme nie ces violences en bloc, comme les mails à l'arrière-goût
antisémite qu'on lui reproche. La juge Borresi en fait lecture. "En
réponse à un mail du directeur de master, Philippe Cassuto, qui vous
interdisait de remettre les pieds dans les cours, vous avez écrit : 'Je n'aime
pas les ordres injustifiés, encore moins venant d'un porc'. Puis, quelques
jours plus tard, toujours en réponse, vous menaciez : 'Ca suffit maintenant, ou
je fais une Shoah" lit la présidente.
Il
avait confirmé son adresse mail avant la lecture de ces passages plus que
choquants, mais en a finalement nié la paternité en fin d'audience en
"conseillant" au tribunal d'enquêter.
Autre
revirement, il avait confirmé notamment le coup de pied, en garde à vue. "J'ai
accepté, sous la menace, que les policiers écrivent ce qu'ils voulaient" lance-t-il,
d'un ton à nouveau accusateur.
Ses
écrits numériques ont amené le procureur Gosselin à qualifier Ali El Boustati
d'antisémite, ce qui a conduit à frôler l'incident d'audience quand Boustati a
tenté de l'interpeller durant ses réquisitions - et que le procureur lui a
intimé de "la fermer". "C'est une insulte, je vais
porter plainte contre vous" n'a pas hésité à lancer l’homme d'à peine
22 ans.
"Rendez-vous
compte qu'il a dit à son directeur de master : 'Mais quand allez-vous arrêter
avec vos tragi-comédies, dont la dernière était ce matin', le jour de la tuerie
qu'a perpétrée Mohamed Merah à Toulouse..." a alors balancé en partie
civile, Me Benayhoun.
Ali
El Boustati, venu sans avocat, a été condamné à 1 an de prison avec sursis et
interdiction de se rendre à la fac. Il a annoncé son intention de faire appel
dès le délibéré prononcé.
Avec
La Provence